Au collège Amadis Jamyn à Chaource, l’ensemble des élèves déposent leur téléphone en arrivant le matin dans son casier.
Depuis la rentrée, plusieurs collèges du département expérimentent le principe de la pause numérique, qui pourrait être généralisée en 2025. À Chaource, les élèves déposent leur téléphone dans les casiers et font « une vraie pause dans la journée ».
Ne vous attendez pas à croiser, des élèves, le téléphone portable dans la poche ou à la main pour envoyer un message ou consulter ses notifications . Si son utilisation est interdite dans les collèges depuis 2018, les collégiens s’autorisaient quelques libertés, en toute discrétion, dans les couloirs, à la récré ou à la cantine.
Au collège Amadis Jamyn à Chaource comme dans neuf autres établissements aubois volontaires, depuis la rentrée, c’est désormais fini. Ils ont fait le choix d’expérimenter la pause numérique. « Nous avons été sollicités par la DSDEN. Lorsque nous avons compris les tenants et les aboutissants, nous nous sommes lancés car cela allait en complément de ce qu’on mettait déjà en place et cela rendait l’interdiction encore plus formelle, plus juste pour les élèves », justifie Benoite Chabin.
La principale du collège n’est pas dupe. Malgré l’interdiction, « ils avaient leur téléphone sur eux ou éteint au fond de leur sac en mode silencieux. On sait qu’il leur arrivait de l’utiliser aux toilettes. »
C’est le cas de Léona, 14 ans en 3 e . « Il m’est déjà arrivé de sortir mon téléphone quand mon copain n’était pas là pour lui envoyer des messages ». La tentation était grande parfois mais elle n’a jamais abusé. « Ça ne change pas grand-chose maintenant ».
Depuis le 2 Septembre, une fois entrés dans le collège, ils le déposent dans leur casier fermé (comme au collège des Roises à Piney et Eugène-Belgrand à Ervy-le-Châtel) et ne le récupèrent qu’à la sortie des cours avant de reprendre le bus ou de repartir avec leurs parents, sous le contrôle de la conseillère principale d’éducation (CPE) Marion Debar. « On leur a annoncé le jour de la rentrée. La principale est repassée dans toutes les salles de classe pour leur rappeler la règle ».
Jusqu’ici, la majorité des collégiens jouent plutôt le jeu. « Il n’y a pas eu de soucis », constate Benoite Chabin. « Un élève s’est fait prendre deux fois la première semaine. Sur 166 élèves, c’est à la marge ».
Dans l’absolu, « ça ne doit rien changer vu qu’ils n’étaient pas censés les utiliser avant même s’il nous arrivait d’avoir de gros doutes parfois et qu’ils contournaient l’interdiction », assure Marion Debar. Du moins pour ceux qui respectaient les choses. Pour ceux qui tentaient de déjouer la surveillance des adultes, il a fallu se discipliner. « Lorsqu’on prend un collégien avec son téléphone, on lui confisque et on le rend aux responsables légaux ».
Des parents qui ont très vite adhéré à l’expérimentation. « Je l’ai présentée lors du conseil d’administration le 1 er juillet dernier.
Ils étaient plutôt favorables car ce n’est pas toujours facile pour eux de mettre un frein. Là, les jeunes font une vraie pause dans la journée et pensent à autre chose que leur téléphone et leurs notifications. On avait déjà fait l’expérience pendant les voyages scolaires où on ne leur donne leurs téléphones qu’une ou deux heures par jour pour appeler leurs parents ».
Un mois et demi après le lancement de l’expérimentation, les retours tant du personnel que des collégiens eux-mêmes sont plutôt positifs. « C’est plus facile à mettre en place vu la taille de notre collège, mais si on n’avait pas eu de casiers, il aurait fallu acheter du matériel ou les mettre dans une salle dédiée avec du personnel pour encadrer », reconnaît Marion Debar, la CPE. « Là, ça n’a rien coûté à l’établissement. On n’a pas sollicité le Département. Je n’étais pas pour payer pour faire une expérimentation. Il faudrait qu’un bénéfice absolu soit reconnu », renchérit Benoite Chabin.
Les téléphones sont déposés dans des casiers fermés
L’établissement ne souhaitait pas non plus que cela soit chronophage pour les élèves étant donné que la plupart repartent en car scolaire. « Ils ont l’habitude de passer à leur casier le matin et en fin de journée », précise Marion Debar. « Et si jamais ils ont oublié leur cadenas, on garde leur téléphone à la vie scolaire ».
Des collégiens ont fait le choix de ne plus l’emmener certains jours, à l’image de Maelane, 14 ans, en 3ème. « Avant, je ne l’éteignais pas tout le temps car je n’y pensais pas mais je ne l’utilisais pas ». La jeune fille ne s’en cache pas. « Certains le sortaient avant pour mettre des sons qui tournent sur les réseaux sociaux. C’est un peu plus compliqué de couper pour eux aujourd’hui ».
Le jeu en vaut la chandelle. « Cela n’impacte pas plus le climat scolaire. Le cyberharcèlement est une vraie problématique. La pause numérique ne change rien car c’est souvent lié à des utilisations hors du temps scolaire », constate Marion Debar. Ceci étant, Leona trouve que « ça apaise ».
Mais une fois dans le bus, elle s’empresse de consulter les messages de son groupe pour ses entraînements de foot et de rassurer ses parents si le car a du retard. Même chose pour Maelane mais pas d’utilisation intempestive pendant le trajet. Les élèves semblent avoir appris à gérer leur dépendance à leur smartphone.
Comme quoi avec un peu d’effort, c’est possible.